• Horowitz Elisabeth - Entretien, salon mieux-vivre Fribourg 2015

    elisabeth horowitz

    Bonjour Elisabeth Horowitz, J'ai vu sur facebook que vous êtes sensible à la maltraitance des animaux, êtes-vous végétarienne et si oui, pourquoi ?

    Oui, je suis végétarienne, je l'ai été très tôt, de 15 à 25 ans. Après durant une période j'ai mangé un peu de viande, mais depuis quelques années, j'ai complètement arrêté. Ce n'est pas à cause d'un rejet de la viande, mais plutôt parce que la maltraitance des animaux a atteint un tel niveau de barbarie, souvent caché au grand public, que je ne veux pas être complice de cette manière de faire qui va à l'encontre des valeurs humanistes que nous, thérapeutes tentons de développer.

    Quelle est l'origine de votre nom et cela a-t-il un lien avec le fait que vous ayez été attirée par la psychogénéalogie ?

    Horowitz est mon nom d'auteur. Je l'ai choisi pour l'admiration que je porte au pianiste Vladimir Horowitz. Dans ma famille, personne n'a de carrière artistique ou littéraire, je n'avais aucun héritage dans le domaine, ils sont plutôt dans l'administration. Je savais que pour réussir, il fallait que je choisisse un autre nom pour changer de destin. Cela fait partie des stratégies proposées en psychogénéalogie, vous pouvez changer de prénom ou de nom de famille, par exemple lorsque vous avez hérité d'un prénom lourd à porter, ou celui d'une personne prématurément décédée dans la famille ou encore le prénom d'une personne cachée comme la maîtresse du père.

    Sur votre site j'ai lu : Thérapeute spécialisée en analyse du roman familial, fondatrice de l’Association Française de Psychogénéalogie. Cela correspond au thème de notre salon de Fribourg "Ma famille, mes racines", qu'est-ce qui vous a amenée à travailler dans ce domaine en particulier ?

    Le déclencheur a été un article dans la revue Psychologies, revue à laquelle j'ai été abonnée dès les années soixante-dix. Le transgénérationnel m'a tout de suite attirée, domaine qui à l'époque n'était pas du tout développé. Je me suis installée en tant que thérapeute dans les années quatre-vingts, et j'ai commencé à pratiquer uniquement sous l'aspect transgénérationnel. Dès la première consultation, l'arbre généalogique était monté jusqu'aux grands-parents, pour replacer la difficulté dans le cadre de l'histoire familiale.

    Une de vos conférences, c'est "L'arbre généalogique et la santé". Selon vous, il y aurait donc un lien ? Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

    Dans la majorité des cas de symptômes qui peuvent émerger au cours de notre vie, c'est la loyauté envers les membres de notre famille, grands-parents, parents, oncles et tantes, cousins et cousines, qui inconsciemment nous fait déclarer ces maladies. C'est une manière de faire partie du clan. L'âge est le principal déclencheur des symptômes. Dans mes consultations, je découvre de nombreux cas en posant les questions suivantes : "Dans votre famille, des membres ont-il déjà eu ce genre de symptôme ou de maladie ?" "Quel âge avez-vous ?" "Que s'est-il passé au même âge pour vos parents ou vos grands-parents ?"

    C'est l'environnement familial dans lequel on est né, pensées, croyances, habitudes qui va déterminer le type de maladies de la personne ?

    Personne ne vit isolé, tout le monde naît au milieu d'un système, quel qu'il soit et un phénomène de répétition par loyauté existe. Freud déjà posait la question : "Quelqu'un dans votre famille a-t-il déjà eu ce type de problème ?" Freud avait découvert que le phénomène de répétition était actif. Un cas récent, une femme vient de déclarer un cancer du sein. Mes questions font apparaître les faits suivants : son fils vient d'avoir douze ans, quand elle-même avait douze ans, ses parents avaient divorcé, elle a dû déménager, beaucoup de changements difficiles pour elle. Pour survivre, la réaction de l'humain est différée et le symptôme peut surgir lorsque nos enfants atteignent l'âge où nous-mêmes avons vécu le traumatisme. Lorsque des conditions similaires se présentent, le terrain est favorable à la manifestation du symptôme. Il existe une horloge interne. Arrivé à un âge sensible, si l'on n'est pas conscient, on peut manifester des symptômes par loyauté. En conscience, on peut se dire, "Tiens, je fais un symptôme de loyauté envers ma mère, je le perçois, mais c'est une illusion." et le symptôme peut disparaître.

    Une autre conférence, c'est : "De la Psychogénéalogie aux Actes symboliques" qu'entendez-vous par acte symbolique ?

    C'est la réponse à cette question : "Maintenant que j'ai compris d'où viennent les problèmes, je fais quoi avec cela ?" Actes symboliques, nouvelle discipline qui émerge dans les sciences humaines. La société va de plus en plus vite et on veut des solutions rapides et efficaces. Actes symboliques, mini-rituels mis en place pour régler des problématiques de l'histoire familiale, maltraitances, préférences, deuils, mini-rituels qui vont résoudre les problèmes en un temps record. Tout ce processus est bien détaillé dans mon livre paru chez Jouvence : Les actes symboliques.

    Avez-vous un exemple d'acte symbolique ?

    Pour dépasser un problème de maltraitance par les parents, vous pouvez commencer par faire un immense poster de ce parent et petit à petit réduire la taille de la photo jusqu'à la grandeur d'un timbre poste. Si le parent en question est décédé, vous pouvez créer un masque de ce parent et demander à une personne de porter ce masque durant une demi-journée pour pouvoir communiquer, lui dire ce que vous avez sur le cœur.

    Sur le premier site francophone chrétien de relation d'aide professionnelle, j'ai trouvé la description détaillée de votre ouvrage "Se libérer du destin familial, devenir soi-même grâce à la psychogénéalogie." Selon vous, y a-t-il un lien entre l'évolution personnelle et la religion et quel est-il ?

    Le premier niveau, c'est de travailler sur ses origines, sur l'héritage transgénérationnel. Chaque génération est victime en quelque sorte de la génération précédente. Après, l'être sera disponible pour accéder à d'autres niveaux de conscience. Nombre de névroses viennent de la religion pratiquée dans le milieu familial, malheureusement parfois devenue un frein à l'évolution.

    En quelques mots, quelle peut être l'influence de nos quatre grands-parents sur notre vie personnelle ?

    Comment ils se sont rencontrés, le type de couple qu'ils ont formé, l'éducation qu'ils ont donné à nos parents, le fait que nos parents aient été soit les enfants préférés, soit les enfants délaissés voire maltraités, leur position dans la fratrie, l'écart d'âge entre les enfants, s'ils étaient des enfants de remplacement, les secrets des familles, tout cela aura des conséquences importantes sur notre propre destinée. Moi-même, je suis l'aînée et cela a eu des conséquences dans ma vie. La configuration familiale en elle-même crée déjà une destinée.

    C'est une grande question pour moi : les secrets de famille, est-il préférable qu'ils soient révélés ou précieusement gardés et dans le premier cas, de quelle manière faut-il les dire ?

    Il n'y a pas de règle absolue. Selon moi, il vaudrait mieux que chacun ait connaissance des secrets de sa famille, mais la prudence est de mise dans le domaine. On peut être victime d'un secret de famille si on l'ignore totalement. Par exemple, tout le monde sait d'une personne que son père n'est pas son père, sauf elle-même. C'est arrivé à une de mes clientes qui l'a appris par sa mère, au décès de son père. Cela a été une explication au fait qu'elle n'avait jamais réussi à former un couple. Dans cette situation, taire le secret a eu des conséquences graves. Il y a une autre situation où une femme sait que sa sœur n'a pas le même père qu'elle, mais la mère lui a fait jurer de ne jamais en parler. Chaque fois que les deux sœurs se voient, le secret plane entre elles. Dans ce cas, il vaut mieux le dire. Le secret peut ronger une personne et la rendre malade, comme un de mes clients dont la fille va se marier, il vient de déclarer un cancer du pancréas, il n'est pas le vrai père de sa fille mais ne l'a jamais dit et ça le ronge. Dans ce cas-là, il est urgent de révéler le secret.

    Faire un travail sur soi en psychogénéalogie va-t-il avoir des conséquences sur les générations futures, mes enfants, mes petits-enfants ?

    Bien sûr, cela va permettre de ne pas répéter ce que l'on a subi, cela va amener à une prise de conscience de nos comportements inadéquats envers nos enfants. En plus vous pourrez faire les deuils qui doivent être faits, analyser les syndromes d'échecs par exemple ou encore réaliser l'importance de laisser aux enfants le choix de faire ce qu'ils aiment dans la vie. En résumé, c'est une remise en cause du fonctionnement familial.

    Un pont entre le conscient et l'inconscient, quel procédé utilisez-vous ?

    Il y a d'abord l'analyse des rêves, le rêve est un des principaux pont entre le conscient et l'inconscient. J'ai l'exemple d'une patiente qui a rêvé que son frère avait un enfant caché. En lui posant la question, elle a découvert que c'était une réalité. Cela a modifié ses liens familiaux. Vous aurez également des révélations par les synchronicités, si vous rencontrez par hasard un ami d'enfance que vous n'avez pas revu depuis plusieurs années, il se peut qu'il détienne une information que vous ignorez. Les voisins, les commerçants, les amis, les médecins, les parrains et marraines, les personnes qui sont en périphérie de l'arbre généalogique peuvent détenir des secrets qui vous auraient été cachés. Les rencontrer par hasard, l'inconscient familial peut les avoir placés sur votre chemin et il vaut la peine de les interroger. Une autre donnée importante, ce sont les repas familiaux. Dans les constellations familiales, nous remettons en scène des événements qui ont été traumatisants. Le dessin aussi permet de poser sur le papier des troubles, toutes sortes de traumatismes en vue de les regarder et de commencer à les soigner.

    Quand on devient thérapeute, à mon avis, c'est parce qu'on en a un grand besoin pour soi-même. Quelles problématiques personnelles vous a le plus touchée lors de votre propre formation ?

    Oui, c'est possible. Pour ma part, dans ma famille nous étions déjà orientés vers le social. Cela correspond aussi à une espèce de vocation. C'est un métier délicat qui ne peut pas être improvisé. Un grand amour de l'humain est indispensable. Chez moi, un secret a été longtemps bien gardé, ma grand-mère maternelle a été internée en hôpital psychiatrique pendant longtemps, elle y est décédée. La maladie d'Alzheimer n'existait pas, c'était plutôt : folie, troubles psychotiques ou schizophréniques. Je ne l'ai pas appris par ma famille, mais par la seconde épouse de mon père qui un jour me l'a avoué. Cette grand-mère avait été traitée aux électrochocs et c'est cela qui inconsciemment m'a amenée à choisir cette voie, pour la soigner à posteriori.

    Vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages, l'écriture est un travail de solitaire tandis que l'animation et les conférences sont tournées vers le public. Quelle partie préférez-vous et pourquoi ?

    Dans une première phase, j'ai fait beaucoup de conférences, mais depuis dix ans, j'ai préféré l'écriture. Maintenant, je reviens. Fribourg sera le départ d'une nouvelle série de conférences. C'est une alternance. J'aime les deux choses.

    Êtes-vous heureuse, Elisabeth Horowitz ?

    Euh... Question difficile, nous passons tous par des phases de remise en question. Il y a des carrefours dans la vie... C'est une bonne question, merci de l'avoir posée ! Rires... Je pense que je pourrais être plus heureuse que je ne le suis. J'espère être plus heureuse dans le futur ! Voilà !

    Avez-vous quelque chose à ajouter ?

    J'espère que ces deux conférences correspondent aux attentes du public suisse. J'ai aussi fait de la publicité sur les réseaux sociaux. On viendra aussi de France. Je fais le vœu que la conférence sur les actes symboliques, titre de mon livre édité chez Jouvence, ait du succès. Les rituels proposés correspondent aux besoins du moment. A bientôt à Fribourg. 

    Merci Elisabeth Horowitz

    Christiane Kolly - 17 octobre 2015


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